LES FEMMES DU HAREM
Topkapi, le harem des harems Le Versailles du Roi Soleil était peuplé d'environ dix mille courtisans, dans un genre différent mais tout aussi
surprenant, un autre palais à la même époque, celui de Topkapi à Istambul,
comptait lui environ deux mille personnes, exclusivement des femmes et des eunuques : les "favorites", bien entendu,
mais également le personnel de garde et de service.
Les
femmes-esclaves confinées dans le harem intriguaient souvent afin de gravir les
échelons et aspiraient toutes plus ou moins à devenir la mère du futur prince
héritier pour ainsi être la "sultane mère". Au préalable et malgré la
rude concurrence il fallait parvenir à se faire remarquer par le seigneur-sultan afin de faire partie du cercle restreint de ses favorites puis, peut-être et
selon son bon vouloir, devenir mère de prince.
La mère du fils aîné devenait quelquefois l’épouse en titre du sultan et pouvait alors se poser directement en rivale de la reine-mère, c’est-à-dire de la respectée et puissante "vâlide sultan". Il arrivait aussi qu'une partie de ces femmes disparaissent mystérieusement et discrètement du harem, probablement empoisonnées. D'autres étaient promises à de hauts fonctionnaires ou à des nobles et quelques-unes vieillissaient tout simplement au sein du harem.
Seul, le fils aîné accédait au trône et sa mère pouvait acquérir à partir de ce
moment le titre envié de "vâlide sultan". Le premier fils dans la
descendance sera prince héritier et les autres princes, plus jeunes, auront un
sort des moins enviable puisqu'ils seront purement et simplement exécutés le
jour de l’avènement de leur demi-frère aîné. Les "muets du sérail",
sont les bourreaux chargés de l’assassinat des jeunes frères du futur sultan.
Ils devaient exécuter leur besogne en silence avec une cordelette de soie. Il
n’y avait pas de compte rendu de l’acte et il arrivait aussi qu’on réduise cyniquement
les muets du sérail au silence, leur tâche d’étrangleur dûment accomplie.
 Drame au harem, Théodore Ralli, 1908
Un canon de beauté encore et toujours ?
La légende des Circassiennes et des Géorgiennes, qui
a fait souche non seulement en Turquie mais aussi au Proche-Orient est encore
bien ancrée aujourd’hui. Pour les femmes, il faut avoir la peau laiteuse, une
assez grande taille, une corpulence dite en chair de poisson, autrement dit bien en
chair, de longs cheveux blonds ou de jais avec des yeux bleus.
Dans son ouvrage paru en 1855, "la Turquie actuelle",
Ubicini relate la rencontre fortuite qu’il fit un jour, du côté de
Scutari sur la rive asiatique du Bosphore, avec quelques esclaves du harem qui avaient pris sous bonne escorte leurs quartiers d’été à la campagne. Ubicini raconte avoir eu la chance
de contempler un spectacle peu ordinaire : "j’avais eu le temps d’apercevoir
leurs visages à la dérobée. Quelques-unes me parurent d’une beauté parfaite :
blanches, élancées, l’ovale de leur figure d’une pureté irréprochable, de grands yeux fendus en amende, voilés par de longs cils, l’arc des sourcils comme
dessiné au pinceau. Une seule, peut-être moins belle que ses compagnes, me
parut néanmoins très séduisante. C’était une Circassienne sans doute, d’une
vingtaine d’années, aux traits un peu fortement accentués et un peu trop voisine
pour mon goût de cet état d’embonpoint que prisent si fort les turcs. Elle
était vêtue d’une féradgé turque bleue ciel dont les plis, en s’entrouvrant, laissaient
à mon imagination fort peu de frais à faire. Je n’ai jamais vu de pose aussi
plaisante. Elle se renversait en arrière en se regardant dans un petit miroir
de métal qu’elle tenait à la main, penchait la tête sur son épaule entrouvrant
ses lèvres et faisant voir des dents d’une blancheur éclatante. Mais à qui pouvaient bien s’adresser
pareilles coquetteries ?"
Les hammams
pouvaient être nombreux dans l’enceinte du harem. Il y en avait de toutes sortes,
allant d’un réduit simple aux espaces somptueux, chauffés et ornés de marbre avec des fontaines aux robinets plaqués or. La fonction hygiénique du hammam reste
secondaire. L’essentiel de sa pratique assidue réside surtout dans le fait
d’être ensemble, de fumer le narguilé, de prendre boissons et sorbets, de discuter,
de s’observer aussi. C’est un lieu de sociabilité où chaque femme apporte sa
contribution. Les tableaux des orientalistes ne se
trompent guère, il est souvent question de beautés diaphanes alanguies dans la
moiteur translucide du hammam. La réalité n’est finalement pas si loin de la
fiction. Evoquer une certaine forme de batifolage léger dans les hammams du sultan
fait partie de la petite histoire chère à bien des historiens et artistes occidentaux, et oublier de parler de l'absence de commodités et d'hygiène dans le faste du palais de
Versailles aussi...
 Esclaves à vendre, Gérôme
Le harem était composé d'esclaves achetés au marché. Comme une loi du Coran interdisait de réduire une musulmane en esclave, les jeunes femmes étaient toutes non musulmanes et venaient généralement du Caucase et de Bosnie. Elles apprenaient l'islam et la langue turque une fois au palais. Le voyageur chroniqueur ottoman Evliya Celebi mentionne des défilés devant le sultan Mourad IV, grand amateur de sexe et de vin, qui acheta pas moins dit-on, une centaine d'esclaves pour les verser au service du harem.
Cf/ Harems, mythe et réalité, Altan Gokalp, Editions Ouest-France 2008
Jean-Henri-Abdolonyme Ubicini, né à Issoudun le 20 octobre 1818
et mort en décembre 1884, est un
voyageur et historien français. La Turquie actuelle (1855) Texte en ligne
 Circassian Lady, Gérôme
Aziyadé - Fantôme d'Orient - Pierre
Loti Un
jeune officier rencontre à Salonique une jeune Circassienne appartenant au
harem d'un riche vieillard à Istanbul. Son amant, officier de marine
britannique, rappelé en Angleterre, la quitte malgré lui. Quand il la retrouve,
la jeune femme est morte de chagrin. Il meurt à son tour au combat. Un roman quasi autobiographique de Pierre
Loti qui séjourna en Turquie et rencontra Aziyadé en 1877. « - Avant mon arrivée en Turquie, que faisais-tu, Aziyadé ? - Dans ce temps-là,
Loti, j'étais presque une petite fille. Quand pour la première fois je t'ai vu,
il n'y avait pas dix lunes que j'étais dans le harem d'Abeddin, et je ne
m'ennuyais pas encore. Je me tenais dans mon appartement, assise sur mon divan,
à fumer des cigarettes ou du hachisch, à jouer aux cartes avec ma servante
Emineh, ou à écouter des histoires très drôles du pays des hommes noirs, que
Kadidja sait raconter parfaitement. » (extrait)





The Slave Market by Otto Pliny
http://verat.pagesperso-orange.fr/Odalisque4.htm
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L'image de la femme
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